Gervais Launay au Gué

Vendredi 2 octobre 2009, par Fil — Historique (Le Fort) 1 commentaire

Gervais Launay est professeur de dessin au collège de Vendôme. Sa vie (1804—1891) parcourt pratiquement tout le XIXe siècle, durant lequel il dessinera quantité de monuments de Vendôme et de la région. Notant dans ses carnets les informations qu’il récolte au fil de ses excursions, il y ajoute esquisses et relevés, découpant à l’occasion des morceaux de pages pour les coller quelques feuillets plus loin... Ces manuscrits, précieusement conservés à la bibliothèque de Vendôme, sont fragiles — espérons qu’un étudiant en histoire voudra un jour s’y consacrer.

Répertoire

Répertoire archéologique

Dans son Répertoire archéologique (1889), Gervais Launay a recensé rapidement tous les renseignements qu’il a accumulés au fil de sa vie dans l’arrondissement de Vendôme. Voici la section concernant le Fort (pp. 139-140) :

Le fort du Gué-du-Loir, à deux kilomètres au sud-est de Mazangé. Dans un endroit où la route est très resserrée entre le Loir et le coteau, on voit un rocher énorme, formant une saillie prononcée et percé de profondes excavations à 20m environ au-dessus de la route. Une muraille épaisse crénelée, élevée circulairement en avant du rocher, masquait ces excavations. Couloirs étroits dans l’épaisseur du rocher, pour établir une surveillance et pour servir d’issue au besoin. En 1823, éboulement d’une partie de la muraille et du rocher. Boulets trouvés dans les décombres.

Manuscrits

Plus rare, la bibliothécaire de Vendôme m’a permis de consulter, fin août, les manuscrits de Launay :
 n° 383 Renseignements historiques et archéologiques sur 8 cantons de l’arrondissement de Vendôme (liasse de dix cahiers et feuilles)
 n° 384 Plans, croquis et descriptions des principaux monuments... (liasse de 7 cahiers)

Manuscrit 384 (couverture)

Manuscrit N° 384 : le jeudi 17 avril 1862, Launay effectue une excursion au Gué du Loir, la bonne aventure et Mazangé, dont voici le compte-rendu :

Manuscrit 384 (sous-couverture)

En quittant les dernières maisons de Villiers pour gagner le Gué-du-Loir, l’espace entre le Loir et la montagne va toujours en diminuant jusqu’à ne plus présenter qu’une largeur de soixante et quelques mètres.

Dans cet endroit le plus resserré et à cent mètres environ du centre du village se trouve un rocher faisant une saillie prononcée en avant de la montagne. Ce rocher à peu près aux deux-tiers de son élévation, que nous évaluons à 30 mètres au dessus de la route, renferme de vastes excavations creusées de mains d’hommes et figurées dans le plan (Fig. 1)

Esquisse du plan du fort

Il y a quarante ans ces excavations se trouvaient fermées par une muraille circulaire percée de meurtrières dont on voit encore les restes dans la figure 2. Le développement de cette muraille de A en B pouvait être de 30 mètres dont trois à quatre mètres sont encore debout.

Dans ce rocher, isolé par en haut de la montagne on avait pratiqué des ouvertures grillées D, E qui pouvaient mettre en garde contre une attaque venant de ce côté.

Au point C un couloir étroit, semblant se diriger vers le sommet de la montagne mais comblé maintenant à une certaine profondeur devait servir d’issue pour une retraite en cas d’envahissement.

Ce rocher qui porte encore le nom de Fort du gué-du-Loir situé, comme nous l’avons dit, au point le plus resserré dans la vallée, était parfaitement placé pour commander le Loir et la route et pour défendre au besoin l’entrée du Gué-du-Loir, de ce côté. (des Boulets ont été retrouvés après l’éboulement)

Le 12 mars 1823 la muraille et une partie du rocher sur lequel elle était construite s’écroulèrent avec un grand fracas.

Toute cette côté, dite de St André est très curieuse à étudier et présente d’autres excavations non moins intéressantes que celles que nous signalons ici (voir l’histoire du Vendomois de Mr de Petigny page 19).

Relevé du plan du fort

Le relevé du plan du fort porte les mentions :

Le Gué du Loir
Le Fort du gué du Loir
éboulé en 1823
12 mars
Boulets
trouvés
 ?????
à Villiers
meurt.
meurtrières - grilles de fer
25 m 20 m 50

 

Le manuscrit n° 383 comporte un passage presque identique à celui du 384 (sans doute écrit à partir des notes ci-dessus) :

Le Fort du Gué du Loir

Les cursives de Gervais Launay (m. 383)

à l’extrémité de la côte St André, au point où elle se rapproche le plus du Loir, à 40 mètres environ ; et à cent mètres du village, (on voit) un énorme rocher faisant une saillie prononcée en avant de la montagne. Ce rocher, à peu près aux deux tiers de son élévation que nous évaluons à 30 mètres au dessus de la route qui passe entre le Loir et la côte, ce rocher, disons-nous, renferme de vastes excavations creusées de main d’homme.

Il y a quarante ans les excavations se trouvaient encore masquées par une épaisse muraille percée de meurtrières faisant elle-même une saillie circulaire sur le rocher. Le développement de cette muraille pouvait être de 30 mètres environ dont trois ou quatre mètres sont encore debout.

Dans le haut du rocher isolé de la montagne on avait pratiqué des ouvertures par lesquelles on pouvait surveiller une attaque venant de ce côté.

à une autre extrémité de la caverne un couloir étroit semblant se diriger vers le sommet du coteau mais comblé maintenant semblait offrir une issue pour une retraite en cas d’envahissement.

Ce rocher qui porte encore le nom de Fort du gué du Loir situé, comme nous l’avons dit, au point le plus resserré de la vallée était parfaitement placé pour commander le Loir et la route et pour défendre au besoin l’entrée du gu du Loir de ce côté.

Le 12 mars 1823 la muraille et une partie du rocher sur lequel elle s’appuyait s’écroulèrent avec un grand fracas ; plusieurs boulets furent trouvés dans les décombres.

Dessins

Le dessin final, à la plume, du plan du Fort, ainsi qu’un superbe lavis sépia sur papier beige, sont signalés dans le catalogue du fonds Launay. Après quelques démarches administratives, j’en ai obtenu une copie, mais les Archives départementales exigent une demande formelle d’autorisation ainsi que le versement de « droits » pour diffuser ces deux dessins (qui relèvent pourtant du domaine public) sur un site Internet. En attendant d’obtenir cette autorisation, il faudra venir sur place pour les voir.

 vue n° 167 : Le Fort du Gué-du-Loir vers 1860
Lavis sépia sur papier beige (116×189)

 vue n° 168 : Plan du Fort du Gué-du-Loir avec son probable mur d’enceinte encore en place avant l’éboulement de 1823
Plume (97×159)

  • Papier calque

    Launay utilise son calque des deux côtés, ce qui donne ce mélange intéressant entre le relevé du plan du fort et une église (probablement celle de Mazangé).

  • Manuscrit 383

Vos commentaires :

  1. Le 10 novembre 2009 à 18:12, par Annette

    C’est incroyable de lire ce que vous avez trouvé ! Formidable !
    Annette

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